Maîtrise Populaire de l’Opéra Comique : l’éducation citoyenne en chantant

 

Sarah Koné dirige les élèves de la Maîtrise (Crédit : Maîtrise Populaire de l’Opéra Comique)

Sous le buste de Marianne, une cinquantaine d’adolescents reprend a capella « Happy » de Pharrell Williams et « Back to Black » d’Amy Winehouse. Comme tous les lundis soirs, ils ont troqué leurs cahiers et leurs manuels scolaires contre des partitions et explorent ensemble un répertoire allant des classiques de la comédie musicale aux standards du moment.

« Pour entrer dans la Maîtrise Populaire de l’Opéra Comique, il ne faut pas être issu d’une filière voix ou d’une autre maîtrise, explique Sarah Koné, directrice artistique et cheffe de chœur. Lors des auditions, nous ne regardons pas le dossier scolaire de l’élève. Seule la motivation compte ». Créer une formation d’excellence, consacrée aux arts de la scène lyrique et ouverte à tous, sans pré-requis ni frais de scolarité, tel est le projet que mène depuis huit ans, Sarah Koné.

« Avec le chant, ce qui est déterminant c’est l’investissement, explique la chanteuse soprano. On peut commencer à 14 ou 15 ans et rattraper le temps ».

Éducation populaire et citoyenne
Tout a commencé par un simple atelier de chant au collège François Couperin, dans le quatrième arrondissement de Paris, en 2008. Sarah Koné, qui achève sa formation en direction d’orchestre au Conservatoire National Supérieur de Musique et de Danse de Paris, choisit d’y mener son projet personnel de fin d’études. Au cœur de sa démarche, déjà, l’idée d’une éducation populaire à la musique et aux arts de la scène.

« Cet engagement est très lié à mon histoire personnelle, confie Sarah Koné. Je suis une femme dans la direction d’orchestre, ce qui est encore trop rare, et je suis métisse. C’est une réponse au métissage et à la double-culture qui m’a portée. J’ai eu beaucoup de chance et j’ai eu envie de transmettre à mon tour. » 

Les ateliers de Sarah Koné au collège François Couperin rencontrent un franc succès et, au fil des années, la scolarité des jeunes chanteurs est aménagée autour de la formation musicale.

Crédit : Maîtrise Populaire de l’Opéra Comique

En mai 2016, le projet de Sarah Koné prend un nouvel envol : les « Classes Chantantes » reçoivent le label de « Maîtrise populaire de l’Opéra Comique ». Intégrée à l’Opéra Comique, la Maîtrise a ainsi pu élargir son recrutement et rassemble des élèves issus de trois académies. « Il y a une vraie mixité, affirme Sarah Koné. Le but n’était pas de créer une « maîtrise-guetto » mais de travailler le vivre ensemble par la musique. Par-delà la formation artistique, c’est une éducation citoyenne ».

Méthodes pédagogiques innovantes
Aujourd’hui, une soixantaine d’élèves de la sixième à la terminale, reçoit sept heures d’enseignement artistique aménagées sur leur temps de scolarité. Chant, danse, théâtre et claquettes sont au programme. Un cycle supérieur a été créé pour accueillir des élèves âgés de 18 à 25. Certains se dirigent ensuite vers des carrières dans le monde du spectacle. Sarah Koné suit avec une grande attention la réussite de ses élèves et « assiste à chaque conseil de classe »: le chant faisant parfois office de rempart contre le décrochage scolaire.

Crédit : Maîtrise Populaire de l’Opéra Comique

Sarah Koné et son équipe de professeurs s’appuient sur des méthodes pédagogiques innovantes pour enseigner la musique à leurs élèves, qui arrivent grands débutants. La méthode du suisse Émile Jaques-Dalcroze, axée sur le corps et le mouvement, leur permet ainsi « de lire la musique en trois mois ».

À la fin de l’année les étudiants présenteront la comédie musicale Annie sur la scène nouvellement rénovée de l’Opéra Comique.

« Je souhaite tisser deux cultures, défend Sarah Koné. La culture populaire et la culture musicale. Que l’on déchiffre un livret d’opéra ou une comédie musicale, ce sont les mêmes outils que l’on apprend à maîtriser. Oui c’est populaire, et j’y tiens ! »

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