«Hier soir, j’ai réalisé que c’était fini la vie d’étudiant, et puis que la vie d’artiste, ça commence maintenant !». Adalberto Fernandez Torres a 25 ans, un accent chantant et les cheveux teints en blond tirant sur le blanc. Le contorsionniste originaire de l’île de Porto Rico, vient tout juste d’achever la première représentation de Vanavara, spectacle de sortie de la 28ème promotion du Centre National des Arts du Cirque (CNAC) à Châlons-en-Champagne.
Assis dans les gradins désormais vidés de leur public, faisant face à la piste où subsistent quelques accessoires épars, le jeune homme dresse le bilan de presque trois années de pratique intensive. «C’était mon rêve de venir dans une école de cirque, souligne celui qui a appris la contorsion à Porto Rico «en regardant des vidéos sur Internet» et qui a débarqué à Châlons sans parler un mot de français. Le voici donc à présent circassien accompli, gagnant ses premiers cachets et s’assurant le régime d’intermittent du spectacle à l’issue de la tournée de Vanavara.
Des élèves du monde entier
Une professionnalisation dès la sortie de l’école indispensable pour son directeur Gérard Fasoli. «Ce n’est pas dans une école qu’on devient professionnel, martèle le circassien qui fit aussi partie durant six année de l’équipe de France de Trampoline. Je les incite même à travailler à l’extérieur pendant qu’ils sont ici. S’ils sont repérés, ils peuvent partir».

Il faut dire que les élèves sont loin d’arriver débutants au sein de ce cursus supérieur. Tous ont déjà choisi et confirmé leur spécialité avant de passer le très exigeant concours d’entrée. Sur environ 120 candidatures annuelles, Gérard Fasoli et son équipe en sélectionnent une quinzaine. La 28ème promotion du CNAC se compose donc de quinze jeunes artistes venus du Maroc, d’Argentine ou de Seine-Saint-Denis pratiquant une dizaine de spécialités, du cerceau au mât chinois en passant par le trapèze. Des arts qui induisent une grande maîtrise physique et un suivi médical régulier.
Place au collectif
L’acrobate Johan Caussin, 24 ans, s’est d’ailleurs cassé un orteil la veille de la première de Vanavara. «Oh, vous savez les orteils ça se casse comme du verre quand on fait du trampoline !, s’exclame l’artiste à l’oreille sertie d’une large boucle argentée et à la barbe taillée en collier. Peu déconcerté par ses blessures – il a aussi le ménisque cassé – Johan n’abandonnerait ses camarades pour rien au monde. «C’est le spectacle de sortie, ça fait trois mois qu’on répète, on connaît les enjeux, affirme le Provençal passé par l’École Nationale des Arts du Cirque de Rosny-sous-Bois qui dispense la première partie du cursus. «Même si on ne peut pas assurer toute la technique, on ne doit pas mettre en péril le collectif» ajoute t-il.
Après la tournée de Vanavara, en avril 2017, Johan rêve de créer et diriger «un collectif d’acrobates» avec des comparses venus de toutes les écoles de cirque françaises. Et il regorge de projets pour leur future troupe. «Un de mes souhaits serait d’aller jouer du cirque contemporain dans les zones rurales, explique Johan. Comme dans mon petit village de Provence où on voyait passer les petits cirques traditionnels…».

De son côté, Adalberto Fernandez Torres aimerait aussi travailler en France et confronter ses deux disciplines de prédilection: la danse et le cirque. Des parcours et des carrières qui viendront se mêler à ceux des quelques 200 artistes sortis du CNAC en 30 ans. Au printemps 2017, les étudiants de la 28ème promotion feront ensemble leur dernier tour de piste avant de prendre leur envol.

VANAVARA mis en scène par Gaëtan Levêque / Collectif AOC sera en tournée au Parc de la Villette (Paris) du 18 janvier au 12 février, à Reims les 19 et 20 février, à Elbeuf du 17 au 19 mars, à Charleville-Mézières du 19 au 31 mars, à Boulazac du 12 au 14 avril 2017.
Avec Théo Baroukh,, Nora Bouhlala Chacon,, Johan Caussin, Sébastien Davis-Van Gelder & Blanca Franco, Anahi De Las Cuevas, Adalberto Fernandez Torres, Clotaire Fouchereau, Löric Fouchereau & Peter Freeman, Nicolas Fraiseau, Camila Hernandez, Lucie Lastella-Guipet, Thomas Thanasi et Marlène Vogele.